17 mars 2007
Claude Aiguevives, vice-président de Médecins du Monde
ça date un peu mais...
Claude Aiguevives
Pédopsychiatre au Centre Hospitalier de Béziers.
Président de la voix de l'enfant qui est à l'origine du site pilote.
Claude Aiguesvives a créé il y a deux ans un centre pilote qui reçoit les
enfants victimes de violence à caractère sexuel. C'est l'initiative de
l'association " la voix de l'enfant " qui a été soutenu par le
Ministère de la Justice. Quand une plainte a été déposée (par l'institutrice de
l'enfant, par une assistante sociale...), le Procureur de la République demande
une audition dans ce service de pédopsychiatrie, l'entretien est mené par un
officier de la gendarmerie ou par la police des mineurs. Si les déclarations de
l'enfant prouvent qu'il est en danger, au lieu de le conduire directement dans
un foyer d'accueil, il reste dans le service pour un suivi psychologique.
Pouvez-vous définir ce qu'est l'inceste ?
L'inceste est un terme utilisé par les psy car juridiquement, ça a disparu.
Pour nous, c'est la relation à caractère sexuel d'un parent sur un descendant.
Plus largement, au niveau psycho-anthropologique, c'est la relation sexuelle
entre deux personnes d'une même fratrie. Aujourd'hui, certains chercheurs
proposent d'élargir l'inceste à toute personne vivant sous le même toit que
l'enfant, ayant autorité sur l'enfant et partageant le lit avec un des
ascendants de l'enfant.
Aujourd'hui, il existe deux sites pilotes (Saint-Nazaire et Béziers).
Comment est née l'idée de la création du premier site pilote ?
J'ai travaillé pour Amnesty internationale sur les abus psychiatriques en
Russie durant la période de Brejnev et sur la violence politique en Iran. Je
suis devenu vice-président de Médecins du Monde où je me suis occupé de
programmes d'enfants en Iran et en Roumanie, en ex- Yougoslavie puis au Rwanda.
J'ai constaté que les enfants avaient tout autant besoin d'aide psychologique
que de la justice. Un enfant a besoin que cela soit reconnu. Une agression
sexuelle va évoluer dans la tête de l'enfant, toute sa vie il se posera la même
question : " est-ce que je ne suis pas coupable de ce que j'ai subi ?
". Quand l'entourage repousse l'enfant et lui dit qu'il fabule, il va se
remettre en question au niveau de son identité et ne plus savoir qui il est. Ce
n'est qu'après qu'il peut y avoir réparation psychologique. C'est pour cela que
l'on travaille avec la victime.
Il y a deux ans, c'est sous l'autorité du Ministère de la Justice que
l'association la Voix de l'Enfant, que je préside, a lancé l'opération :
l'enquête judiciaire démarre par une audition de l'enfant au centre de pédopsychiatrie
de l'hôpital. L'enfant est écouté par un représentant de la police ou de la
gendarmerie mais il est encadré par un médecin et un psychologue pour qu'il ne
subisse pas un nouveau traumatisme. Il y a une articulation avec le service de
pédopsychiatrie, nous disposons de lits de pédiatrie quand un enfant ne peut
pas rentrer chez lui. Nous lui trouvons un foyer. Alors que normalement, dès
que l'enfant avait parlé et que les faits relatés étaient graves, il partait
tout de suite en foyer. Toutes les auditions sont filmées, ce qui évite à
l'enfant de devoir répéter son histoire.
Qu'est-ce qui fait la nouveauté de cette structure ?
C'est la prise en compte de l'enfant, non pas comme un plaignant qui révèle et
porte plainte, mais comme une personne qui souffre de ce qu'il a vécu.
L'hôpital reçoit tous les accidentés de la vie, on soigne les plaies qui se
voient et celles qui ne se voient pas, les victimes d'inceste en font partie.
Depuis deux ans que ce service existe, combien d'enfants y avez- vous accueilli
?
On reçoit en moyenne 2 à 3 situations par semaine pour 260 000 habitants.
Par qui ces enfants ont-ils été agressés le plus fréquemment ?
90% des enfants sont agressés par une personne qu'ils connaissent à l'intérieur
de la famille. Les cas d'inceste pur (avec lien biologique) sont les moins
fréquents. En revanche, on a beaucoup d'agressions commises par les
beaux-pères, par un des enfants plus âgés du beau- père ou de la belle-mère.
Que se passe-t-il après ce genre d'audition ?
Après l'audition, l'enfant subit une expertise médico-légale dans le même lieu
que l'audition. Si l'enfant vit sous le même toit que l'agresseur, il est placé
dans notre service, si ce n'est pas le cas, il peut rentrer chez lui. En cas de
doute de la parole de l'enfant, c'est le procureur qui prend une décision. S'il
considère, après nous avoir consulté, que la parole de l'enfant est crédible,
il saisit le juge pour enfant qui engage une " enquête préliminaire
".
Que pensez-vous de cette critique émise par un procureur : " un enfant
doit être entendu au commissariat ou à la gendarmerie car l'inceste est un
délit et non une maladie et l'enfant peut croire, en étant entendu à l'hôpital,
qu'il est malade " ?
Une agression sexuelle, c'est une blessure. Au delà du besoin de justice,
l'enfant a besoin d'un accompagnement. Ensuite, les examens " gynéco ou
recto " sont nécessaires. Or, ce sont des examens qui touchent des parties
intimes, c'est un entourage spécialisé qui est mis autour de l'enfant pour
l'aider. Cela évite à l'enfant de devoir se rendre à plusieurs endroits
différents. Ici, tout est groupé.
A-t-on aujourd'hui quelques certitudes sur ce qui pousse un adulte à abuser
de son enfant ?
On a des éléments de compréhension, des situations psychosociales qui favorisent
l'inceste. On décrit le plus souvent des familles qui ont du mal à s'ouvrir
vers l'extérieur, qui sont organisées autour d'un père tout puissant et qui
bien souvent aux générations précédentes ont déjà connu des situations
incestueuses. Concernant les beaux-pères, les situations de violences sexuelles
sur l'enfant de la compagne sont fréquentes car la transgression est plus
facile, n'étant pas lié à l'enfant.
Les conséquences sur les victimes sont-elles différentes suivant qu'il
s'agira d'un père incestueux, d'un cousin, d'un frère ou d'un oncle ?
Oui. Le devenir est différent. Quand il s'agit du père, c'est sa filiation,
donc c'est plus grave, il y a un double traumatisme : sur la filiation et sur
sa sexualité. Alors que, si c'est un frère, un cousin ou un oncle, il n'y a
qu'un traumatisme, celui de son intimité.
On assimile souvent l'inceste à une agression sexuelle commise par un homme.
Les femmes ne commettent-elles pas ce type d'abus ?
C'est une question très controversée car on pense aujourd'hui que l'inceste est
lié à la " sexualité prédatrice de l'homme ". Toutefois, il y a un
certain nombre de femmes qui ont un rapport incestueux avec leurs enfants.
D'abord, le plus souvent, on constate qu'il n'y a pas de problématique "
psychiatrique " repéré chez un homme incestueux, ce que l'on retrouve chez
la mère. On trouve des mères qui dans leur tête continue à imaginer que cet
enfant de 3 ou 4 ans est un bout de leur chair, elles n'arrivent pas à couper
le cordon. Quand une femme agresse son enfant, le plus souvent, ce sont des
attouchements, elles masturbent leur petit garçon. L'inceste commis par la
mère, c'est peut- être encore caché mais c'est encore assez rare.
Une autre explication qui pousserait une femme à toucher son enfant, c'est
qu'il y a des hommes qui se comportent à l'intérieur de la famille comme des
maquereaux, qui ont des rapports de violence avec leurs épouses, qui pratiquent
une sexualité hard. Ces épouses vivent dans la peur et ont perdu tout repère
dans la sexualité " normale ". Ces maris peuvent amener leurs femmes
à être dépossédées de leur dignité de mère ce qui peut les conduire à déraper,
donc c'est la conséquence d'actes forts de domination de l'homme.
Y a-t-il un rapport entre la gravité des faits (attouchement, viol...) et le
préjudice subi par la victime ?
Non, ce n'est pas parce qu'il y a attouchement ou viol que le préjudice est
plus ou moins grave. Ceci est plurifactoriel : c'est lié à l'agression, au type
d'agression, aux autres actes de cruauté associés à l'agression sexuelle, à la
réaction de l'enfant, à celle de l'agresseur, à la fréquence et la durée car
des enfants qui sont abusés pendant de longues périodes vont avoir des
problèmes sur leurs conduites sexuelles. Par exemple, on sait que 2 prostituées
sur 3 au moins ont été victimes d'agressions sexuelles. Beaucoup d'auteurs
imposent le silence à l'enfant. Dans le sujet par exemple, le père disait au
petit garçon que s'il parlait, le père allait le tuer. Tout ça accentue le
traumatisme. Enfin, c'est lié à la reconnaissance des faits par l'auteur. Et
tout cela aggrave le préjudice.
Lorsqu'il n'y pas de passage à l'acte, l'inceste moral est-il autant
dévastateur ?
Dans le cas de l'inceste moral, il y a un déclinement incestueux qui entraîne
des confusions entre la sexualité du père et de celui de l'enfant. Par exemple,
le parent va avoir des propos dans lesquels l'enfant ne doit pas être mêlé. Par
exemple, un papa pense bien faire en racontant la façon dont sa compagne lui
fait l'amour, il imagine éduquer l'enfant dans sa sexualité, autre exemple, les
parents qui regardent une cassette X devant l'enfant. Tout cela est incestueux.
Il ne faut pas affoler tout le monde. L'enfant est curieux par nature. Quand
c'est lui qui va discrètement entrebâiller la porte de ses parents pour voir
comment ils font l'amour, ce n'est pas traumatisant, ça le fera rire. Alors que
lorsqu'on montre, ce sont des besoins qui ne sont pas les siens et là, il est
choqué. On peut alors se poser quelques questions : peut-on se balader nu
devant son enfant, peut-on prendre un bain avec lui ? Pour être nu, il faut
être beaucoup plus clair dans sa tête que quand on est habillé. Pour le bain,
moi je recommande aujourd'hui aux parents à partir d'un certain âge, 3 ans, de
ne pas prendre le bain avec l'enfant. A cet âge, l'enfant a des représentations
c'est-à-dire que cela va laisser des traces au niveau de la vie imaginaire.
Que pensez-vous de la responsabilité de la mère quand l'inceste a été commis
par le père ?
J'ai l'habitude, dans le secret des entretiens que j'ai avec des enfants
victimes, de voir les mamans et de les interroger sur ce qu'elles ont refusé de
subir en tant qu'acte sexuel de leurs maris. Alors qu'une maman ou une compagne
va savoir se protéger des demandes sexuelles atypiques, le compagnon va trouver
quelqu'un de plus vulnérable qui va le satisfaire, et ça tombe sur l'enfant.
Souvent, la maman retrouve dans les actes commis par son mari sur l'enfant des
fantasmes qu'elle lui a refusé.
Mais pourquoi le père n'évacue-t-il pas ses fantasmes auprès de femmes
adultes ?
Parce que la " chair fraîche " est à côté, parce que socialement, cet
homme là ne fréquente pas les prostituées.
Le plus fréquent, c'est la fellation et la sodomie, pratiques souvent refusées
par la partenaire. Un certain nombre d'agresseurs ont des besoins pulsionnels
où le désir passe par l'emprise sur l'autre. L'autre n'est plus " sujet
" mais " objet ". Le père déshumanise l'enfant, il ne le voit
plus comme son enfant mais comme une chose. Le retour à soi entraîne un clivage
énorme, les deux personnalités de l'agresseur ne se rencontrent pas car si
elles se rencontrent, c'est la mort. Beaucoup d'agresseurs se suicident quand
ils découvrent ce qu'ils ont fait. Donc ils " clivent " le loup qui
les habite afin de ne pas être dévoré psychologiquement. Cela passe par
l'annulation, " ça n'a jamais existé ", c'est de la perversion. Les
seuls agresseurs avec qui on peut travailler ont comme caractère de se repentir
donc d'avouer leur trouble. Avec ceux qui nient, comment retrouver des liens ?
Ils rendent l'enfant fou.
INTERVIEW Catherine Perlmutter
Catherine Perlmutter
Avocate
au barreau de Paris, spécialisée en droit des personnes.
Catherine Perelmutter est avocate depuis 17 ans. Elle est spécialisée en
droit immobilier et en droit des personnes, c'est dans ce cadre là qu'elle
collabore depuis 5 ans avec l'association " Enfance et partage " qui
propose un savoir- faire en matière de protection et de défense des enfants
victimes de violences physiques et sexuelles.
Le terme inceste existe-t-il dans le Droit Pénal ?
Le mot inceste n'est pas inscrit stricto sensu dans le Code Pénal Français. Il
constitue simplement une circonstance aggravante du viol. Dès lors, l'inceste
est inscrit dans le code sous les termes " viol commis par une personne
ayant autorité ".
Le viol en tant que tel est un crime susceptible d'être puni par une peine de
15 ans de réclusion criminelle, alors que le viol " commis par une
personne ayant autorité " est susceptible d'être puni d'une peine de 20
ans de réclusion criminelle.
Par " personne ayant autorité ", on entend les personnes ayant un
certain pouvoir sur la victime, c'est à dire : toute personne membre de la
famille ou extérieure à elle qui joue un rôle d'autorité vis-à-vis de la
victime. Il peut donc s'agir des parents, des grands-parents, mais aussi des
professeurs, éducateurs... Mais il n'y a pas de spécificité de punition pour
l'inceste en tant que tel.
Quelle différence fait-on entre le viol et les attouchements dans le cadre
de l'inceste ?
Il existe deux types d'infractions sexuelles pour le comportement incestueux au
sens large : l'une est qualifiée de crime, l'autre de délit. On parle de viol
lorsqu'il y a pénétration par n'importe quel orifice : pénétration digitale,
anale, buccale... Il s'agit là d'un crime qui nécessite une instruction
obligatoire et un renvoi devant la cour d'assises. A contrario, on parle
d'attouchements lorsqu'il n'y a pas de pénétration. Il s'agit donc de toutes
agressions sexuelles commises avec violence, sous la contrainte ou la menace.
Ce délit nécessite également une instruction et un renvoi devant le tribunal
correctionnel.
Le viol jugé aux assises et les attouchements en correctionnelle, est-ce une
réponse immuable ?
Parfois, on fait face à un dossier délicat et par peur que la cour d'assises
acquitte l'agresseur par manque de preuve, on décide d'un jugement en
correctionnelle qui offre plus de certitudes. Donc, souvent, le choix de
l'instance est lié au problème de la preuve.
Indépendamment des actions au pénal, peut-on envisager pour les victimes une
réparation au civil ?
Oui, par exemple pour le viol, parallèlement à la solution pénale, il y a
toujours la possibilité d'aller au civil. Dès lors, ce n'est pas sur le
fondement du viol ou sur l'agression qu'on insiste, mais plutôt sur la faute :
c'est plus les dommages et intérêts qui sont visés.
Et au niveau des peines ?
Comme je vous l'ai dit, le viol est normalement puni de 15 ans, mais il existe
des circonstances aggravantes qui peuvent durcir la peine, notamment le viol
" commis par personne ayant autorité ".
Pour les agressions sexuelles, la peine est de 5 ans mais il existe aussi des
circonstances aggravantes. Si l'acte est commis par un ascendant légitime, par
toutes personnes ayant autorité sur la victime ou encore par toutes personnes
ayant abusé de l'autorité que lui confère ses fonctions.
Comment se déroule la procédure judiciaire ?
Après avoir effectué l'expertise psychologique et médicale de la victime, la
police l'auditionne. A cet instant précis, le procureur décide de poursuivre ou
non la procédure. Si il n'y a pas de poursuite, la victime peut porter plainte
en enclenchant la procédure judiciaire en se constituant partie civile.
Si par contre, le procureur décide de poursuivre la procédure, le juge
d'instruction est saisi et décide de la liberté provisoire ou non de " l'agresseur
". Le juge d'instruction ouvre alors une information avec mise en examen
de l'auteur et confrontation entre les deux parties. Le juge a également la
possibilité de filmer la victime pour éviter un face à face trop brutal avec
l'auteur présumé.
La prescription est un terme qui revient souvent dans les affaires
d'inceste, pouvez-vous nous apporter des précisions par rapport à ce terme ?
Le délai de prescription est le délai qui court à compter de l'infraction,
durant lequel une personne peut-être poursuivie. Ce délai est de 10 ans* après
la commission des faits ou 10 ans après la majorité de la victime : il s'agit
là des nouveaux délais de prescription pour les crimes (viols) en application
depuis 1989. En 1998, le délai relatif au délit (attouchements) a été aligné
sur celui du crime et a donc été rallongé à 10 ans. On peut donc dire que même
si certains éléments liés à l'inceste en tant que tels (amnésie des faits,
période d'occultation...) n'ont pas encore été pris en compte, la justice a
quand même progressé en revoyant par deux fois la loi en 1989 et en 1998.
* 20 ans aujourd'hui
Etes-vous pour l'imprescriptibilité ?
J'ai écrit dans "Libération" que dans l'attente d'une meilleure
solution, la justice devrait peut-être penser à rendre l'inceste
imprescriptible. Or, pour le moment en France, le seul crime imprescriptible
est le crime contre l'humanité, or l'inceste et le crime contre l'humanité sont
deux choses bien différentes.
Une autre solution s'envisage : peut-être que pour les victimes de 29 ans et
plus, on pourrait trouver un moyen juridique de rallonger la prescription.
Peut-être devrait- on trouver une clause de suspension de la prescription. Pour
les cas d'amnésie des faits, on pourrait aussi envisager de faire courir la
prescription à dater de la prise de conscience des victimes. Cela pourrait être
une nouvelle amélioration de la justice. D'un autre côté, cela engendre un
nouveau problème : celui de la dissimulation des preuves et de la difficulté
d'en trouver au moment de l'ouverture du procès.
Mais je crois que la solution est avant tout dans la main des victimes... La
meilleure des choses serait de leur demander si elles ont véritablement besoin
d'un procès pour se reconstruire.
Est-ce qu'une reconstruction est possible chez la victime à partir du moment
où il n'y a pas de procès ?
Quoiqu'il ce fasse, qu'il y ait procès ou pas, la souffrance existe chez les
personnes abusées. Il faut bien garder à l'esprit que le procès n'est pas une
recette miracle pour atténuer la souffrance. Il peut aider, mais ne peut pas
tout résoudre. Pour ma part, je crois que encore mieux qu'un procès, c'est la
psychothérapie qui permet la reconstruction.
Il faut toujours se poser deux questions :
Est-ce que les réponses que l'on peut donner sont uniquement judiciaires ?
Est-ce forcément dans la réparation judiciaire que l'on doit creuser ?
Il est vrai qu'être reconnu comme victime est peut-être l'élément le plus
important, car chez les témoins, il y a toujours cette culpabilité diffuse,
cette impression d'être le criminel. C'est un passage primordial, et peut-être
encore plus pour l'enfant que pour l'adulte, car l'enfant, pour croire en la
société dans laquelle il grandit, doit croire en son système judiciaire. A
partir du moment où l'enfant est reconnu comme victime, il va pouvoir se
libérer de ce statut de victime. Le procès peut-être un bon point de départ
pour ce faire, mais ce n'est pas l'unique possibilité. Il y a d'autres moyens
comme engager une procédure pour changer de nom afin de ne plus porter le nom
de son agresseur, etc...
Dans un article de " Libération", vous faîtes un parallèle
intéressant entre l'inceste et le crime contre l'humanité. Qu'entendez-vous par
là ?
J'insiste tout d'abord sur le fait que ce n'est pas du tout la même chose, mais
qu'après observation, on décèle pas mal de similitudes.
D'abord au niveau du silence de la société qui laisse commettre des crimes sans
ouvrir les yeux avec, en outre, un énorme délai pour réussir à prendre
conscience des choses.
Ensuite, au niveau de la puissance du traumatisme. On observe dans les deux cas
le traumatisme des survivants qui se transmet bien souvent sur plusieurs
générations (3), à cause de l'intensité du choc.
Et puis, il y a aussi la perte d'identité de la victime dû à la présence de
nombreux troubles du comportement.
INTERVIEW Estelle Kuil
Estelle Kuil
Psychologue
victimologue
Estelle Kuil est spécialisée en thérapie cognitive et comportementale. Elle
est diplômée en victimologie; un diplôme délivré par le Centre International de
Science Criminelle de Paris. Ce n'est pas reconnu par l'Etat mais par la
profession. C'est une formation supplémentaire obtenue en une année avec cours
et stages aux Etats-Unis dans les services compétents. Elle est spécialisée
dans les problèmes de sévices sexuels sur les enfants.
Comment définissez-vous l'inceste ?
C'est un acte très particulier dans la mesure où acteur et victime ont des
liens de parenté. Très souvent, agresseur et victime s'aiment profondément.
L'enfant obéit à son père parce que celui-ci représente l'autorité et fait de
son mieux pour que la vie de son enfant soit épanouissante. Donc, la victime
n'intègre pas que ce qu'il vit est anormal. La problématique des victimes est :
"j'aime ou je n'aime pas mon père ?". J'ai reçu ce matin une petite
fille de 5 ans violée par son père qui me demandait : " Est- ce que je ne
dois plus aimer mon papa parce qu'il m'a fait des choses ? ". Dans la tête
de l'enfant, ce n'est pas clair. Dans le viol par exemple, il n'y a pas de
liens directs, la rage monte. Chez les victimes d'inceste, cette rage n'existe
pas ou du moins elle a du mal à s'exprimer.
Si les sévices persistent, l'enfant commence à sentir que quelque chose ne
tourne pas rond car il sent un tabou autour du sujet. Une question dans la tête
de l'enfant devient de plus en plus présente : " c'est bien ou mal ?
". J'ai reçu une petite fille de 7 ans dont les parents avaient divorcé.
Elle a été violée par son père. Je lui ai demandé pourquoi elle n'en avait pas
parlé avant. Elle m'a répondu : " mon père m'a dit que si j'en parlais, je
ne viendrais plus le voir. Moi, j'aimais mon papa et je ne voulais pas ne plus
le voir, alors j'ai demandé à ma mère si c'était vrai que si on disait un
secret, on ne reverrait plus son papa ". Sa mère a creusé, la petite lui a
tout raconté et la machine judiciaire s'est mise en route.
Existe-t-il selon vous un inceste " moral " ?
Oui. Ce sont des enfants qui me disent : " mon père, il me regarde
bizarrement, je sens un truc pas normal " ou alors : " mon père
m'achète mes soutiens-gorge, ça lui procure du plaisir "… Attention, je ne
veux pas faire peur à tous les pères de France. Mais c'est un climat
incestueux. J'ai connu une petite fille qui me disait : " je ne supporte
pas l'haleine de mon père ". En fait, le père embrassait sa fille trop
près de sa bouche et ça la mettait mal à l'aise. Et effectivement, il y avait
une ambiguïté dans la tête du père qui aurait pu passer à l'acte. En fait, ce
sont des éléments à connotation sexuelle qui sortent du contexte normal. Il y a
un regard qui déshabille, une main qui frôle les fesses et qui s'y attarde un
petit peu.
Justement, pour rassurer " tous les pères de France ", quelles
sont selon vous les limites à ne pas franchir ?
On peut prendre son enfant sur ses genoux sans pour autant avoir un geste
incestueux. Ce qui est important, c'est que le geste ne comporte pas
d'ambiguïté. Un père qui déshabille sa fille du regard, elle le ressent.
L'enfant interprète ce qu'il reçoit. C'est pareil avec les mots. Certaines
expressions peuvent être sexuées. L'ambiance incestueuse est parfois plus destructrice
que le passage à l'acte.
Vous avez l'habitude d'auditionner des enfants qui s'expriment pour la
première fois. Que pensez-vous des sites pilotes du Docteur Aiguesvives ? Je
trouve que c'est bien car l'enfant va pouvoir dire un maximum de choses en un
minimum de temps. J'ai vu des enfants qui avaient subi 3 auditions policières,
deux consultations chez le médecin légiste, le gynécologue, c'est traumatisant
pour l'enfant. Alors que là, tout est fait dans un même et unique lieu. En
plus, je suis pour l'audition enregistrée car on n'analyse pas uniquement les
propos de l'enfant, on regarde aussi son comportement. Un enfant qui baisse la
tête, ou qui s'exprime d'une façon robotisée peut cacher quelque chose.
L'enfant peut avoir peur de dire tout ce qu'il a subi, il peut essayer de
protéger son agresseur et tout cela, on ne peut l'analyser que si l'entretien a
été filmé. Maintenant, certains juges d'instruction sont défavorables à l'idée
de faire passer une audition à l'hôpital. Selon eux, ce lieu symbolise la
" maladie " alors que le commissariat symbolise le " délit
" et effectivement, un inceste, c'est un délit. Mais je pense que tout
dépend de la manière dont on prépare l'enfant. Il faut lui expliquer avant. La
façon dont l'enfant va pouvoir s'exprimer est très importante.
J'ai vu une petite fille qui a été traumatisée, une fois de plus, par les flics
car ils sont venus la chercher à la maternelle, pendant la récréation. Pour
elle, elle était coupable, on l'emmenait comme une criminelle. Aujourd'hui,
policiers et gendarmes essaient de faire des efforts car on parle de plus en
plus de l'inceste et de ses conséquences. Mais cela n'a pas toujours été le
cas.
Lorsque l'enfant se décide à parler, on constate que souvent, le parent qui
accompagne l'enfant (souvent, la mère) dit ne rien avoir vu. Qu'en pensez-vous
?
Après avoir entendu les enfants, je demande systématiquement aux mamans :
" n'avez-vous pas senti qu'à un moment donné votre enfant avait une
attitude anormale ? ". Toutes me répondent " oui " mais elles ne
pensent pas à l'inceste, c'est tellement tabou qu'elles ne l'imaginent pas. Le
fils a mal au ventre de manière chronique, la fille ment sans arrêt ou alors,
il y a aussi les enfants qui se réfugient dans le travail à l'école. D'élèves
moyens ou médiocres, ils deviennent des têtes, comme s'ils devenaient
boulimiques. J'ai même eu le cas d'une petite fille de 6 ans qui soulevait
toujours sa jupe. Pendant l'audition, sa mère m'a dit : " elle est
aguicheuse ma fille, elle veut charmer tout le monde ". Après en avoir
parlé, la mère a compris que sa fille mimait ce que son père lui demandait de
faire, c'était un signe. On essaie de comprendre avec la maman ce qui s'est
passé, il y a des détails qui reviennent, comme par exemple des revues pornos
qui traînent sous le lit. On trouve aussi des mamans qui rejettent tout en bloc
et qui n'arrivent pas à aider leurs enfants. J'ai eu par exemple, le cas d'une
mère qui n'arrivait pas à en parler avec sa fille. On a découvert qu'elle avait
elle-même été victime d'inceste pendant son enfance. Elle n'en avait jamais
parlé. N'ayant pas résolu son histoire, elle ne parvenait pas à aider son
enfant, c'était trop douloureux.
Les victimes qui n'ont pu en parler pendant les faits s'enferment dans
l'amnésie. Les souvenirs ne réapparaissent semble-t-il qu'à l'âge adulte.
Comment expliquez-vous cette forme d'amnésie ?
Inconsciemment, l'enfant se force à mettre ça de côté. Vous savez, quand on
vient de finir une relation sentimentale, on fait tout pour oublier la personne
et petit à petit, l'oubli se fait. Dans le cas de l'inceste, l'enfant va
verrouiller toutes les portes d'accès à ce souvenir. En grandissant, des
événements vont malgré tout réactiver le souvenir. Une odeur, une balade, une
situation suffisent à déclencher des flashs, ça provoque une réaction, c'est la
madeleine de Proust.
Par exemple, une femme est venue me voir. Elle était mariée depuis plusieurs
années, un mariage vraiment réussi. Pendant un rapport sexuel, son mari a passé
sa main sur son corps, ce geste lui a provoqué une réaction violente car d'un
seul coup, elle a vu la main de son père. Autre exemple : une maman préparait
le goûter d'anniversaire de sa fille qui fêtait ses 6 ans. Elle préparait un
gâteau et d'un seul coup, sans savoir pourquoi, elle a sauté par la fenêtre.
Par chance, elle s'en est sortie. Je lui ai demandé : " qu'est-ce qui vous
est arrivé à 6 ans ? ". Elle ne savait pas. On a réussi à faire resurgir
les souvenirs, elle s'est faite abuser à 6 ans. C'est tellement violent sur le
plan psychique que la personne oublie mais en face d'elle, elle avait son
équivalence. Très souvent, les souvenirs sont réactivés au moment de fonder une
famille. Cela se réactive tout doucement mais il y a toujours des symptômes,
des signes qui nous laissent entendre qu'il a pu y avoir inceste.
Quels sont ces symptômes ?
Il y en a plusieurs. La personne peut souffrir de troubles alimentaires.
Anorexique ou boulimique, elle se fait vomir pour " cracher le venin
" qu'elle a reçu étant enfant. Ensuite, la personne veut déformer son
corps car elle ne veut pas avoir de forme qui pourrait attirer un homme. Autre
symptôme : les TOC. Certaines victimes se lavent les dents de façon excessive
jusqu'à se déchausser les dents. On veut purifier, se laver la bouche d'une
fellation. Et puis il y a les problèmes sexuels. Soit la personne évite toute
relation, c'est le blocage, soit elle tombe dans l'excès. J'ai reçu une
prostituée qui me racontait sa vie. La journée, elle avait un boulot, et elle
se prostituait la nuit. Elle m'a dit : " vous savez, la nuit, c'est moi
qui domine, c'est moi qui décide, je ne suis plus une victime ". J'ai
rencontré d'autres victimes qui pratiquaient le sado-masochisme. Ils rentrent
dans une sexualité extrême qui fait mal pour sortir de la problématique "
je suis soumis ". La personne maîtrise adulte ce qu'elle n'a pas pu
maîtriser enfant.
Les victimes se posent en général les mêmes questions : pourquoi ? pourquoi
moi ? A-t-on des réponses pour les aider à comprendre ?
Le pourquoi...
Environ 50 % des pères incestueux ont vécu des choses similaires dans leur
enfance. Ce n'est pas forcément dans l'intra-familial, ça peut être une
agression sexuelle subie par un membre extérieur de la famille (un éducateur,
un ami de la famille). Ils ne reproduisent pas forcément les mêmes actes. Si le
père incestueux n'a pas eu d'explication sur ce qui lui est arrivé (ce n'est
pas bien ce qui s'est passé sur ton corps à toi), il peut glisser
progressivement vers l'agression sexuelle sur son propre enfant.
Certains agresseurs dérapent dans la confusion. Ils confondent l'amour légitime
et le dérapage et comme l'enfant ne dit rien, ils continuent. Mais ce n'est pas
dans le but de faire mal, ils sont dans la confusion.
Il y a les pervers sadiques qui font ça pour faire mal. Souvent, ces types ont
eu un passé particulier de maltraitance, de violence ou d'abus sexuels.
Ensuite, on trouve le profil du délinquant limite psychopathe. Comme ils
n'arrivent pas exprimer leur souffrance, ils se vengent et passent à l'acte.
Le Pourquoi moi....
Il y a beaucoup de réponses possibles. Il est important de faire des recherches
poussées autour de la famille. On doit comprendre la généalogie. Si un père qui
était l'aîné de la famille dérape, il est possible qu'il s'en prenne à sa fille
aînée. On retrouve souvent l'explication dans le rôle que le père a eu à jouer
avec ses propres parents, frères et sœurs, oncles, ...Ce n'est jamais par
hasard qu'il reproduit sur cette fille là et pas une autre.
REVUE DE PRESSE
Une criminalité qui sort de l'ombre.
Libération, le 5 novembre 2000.
Les viols sur mineurs concernent un quart des verdicts en assises.
Quelques cas litigieux ne doivent pas masquer l'ampleur de la situation et de
la prise de conscience : en France, le nombre de condamnations pour viols sur
mineurs représente quasiment le quart des verdicts rendus en cours d'assises (
soit 475 condamnations de ce type en 1998). A l'heure actuelle, les tribunaux
en correctionnelle ou en assises sont débordés par des affaires de ce genre,
qu'il s'agisse d'inceste ou de pédophilie.
Longtemps ignorée, la parole de l'enfant et de l'adolescent s'est aujourd'hui
libérée. Comment ? Grâce notamment aux campagnes de sensibilisation, à la
prévention dans les écoles : on apprend aux enfants que leur corps leur
appartient, on les alerte. A la télévision, la diffusion de reportages sur ce
thème déclenche immanquablement, des "pics" de plaintes dans les
jours qui suivent.
Enfin, l'arsenal législatif (depuis 1998, la loi oblige par exemple les
enseignants à saisir la justice, même sur la base d'un soupçon, de toute
violence exercée contre un enfant) permet aux gendarmes et policiers d'écouter
rapidement les enfants se disant victimes d'abus.
Inceste : des victimes de plus en plus jeunes.
France Soir, le 23 octobre 1992.
Ces drames à l'origine de la majorité des suicides d'enfants.
Les petites victimes sont de plus en plus jeunes : "Le nombre de viols
commis sur des petits de 2 ou 3 ans, dont certains ont même moins de 1 an ne
cesse d'augmenter, précise France Gublin, présidente d'Enfance et Partage. Et
la majeure partie des suicides ou des tentatives de suicide d'adolescents ont
l'inceste pour origine."
Une détresse le plus souvent cachée, un atroce secret d'alcôve que les enfants
gardent au fond de leur cœur blessé et honteux, aggravé dans la moitié des cas
par le silence de mères complices …Dénoncer l'inacceptable, c'est parfois
reconnaître qu'on s'est tu jusque-là, reconnaître aussi la vraie nature de
l'homme avec lequel on vit, et c'est surtout provoquer un séisme dont elles
seront les premières victimes.
Le monde clos du délinquant.
La Croix, le 23 avril 1992.
Qui sont les délinquants sexuels ?
Les transgressions sexuelles graves sont rarement le fait de grands malades
mentaux. Il n'y a pas de lien de causalité entre la barbarie d'un acte et la
folie de son auteur.
Il y a une dimension paranoïaque chez les transgresseurs sexuels. Ils vivent
l'autre comme un persécuteur, un provocateur : c'est l'autre qui les agresse avec
le désir qu'il met en eux. Ils évitent d'ailleurs de le penser, cet autre, pour
ne pas se confronter aux conséquences de leur acte.
Tout autre est le profils du père incestueux, qui ne violent jamais en dehors
du cercle familial et dont le docteur Coutenceau observe que "dans 80 %
des cas, ce sont des hommes rigides, voire à principes autoritaires chez eux (
c'est le type même du tyran domestique), mais inhibés en société.
Souvent, ils n'ont eu aucune relation amoureuse avant la rencontre avec leur
épouse, et leur vie sexuelle conjugale est très stéréotypée". Sur cette
toile de fond se greffent très souvent l'alcool dont le rôle désinhibant est
avéré, et le chômage. L'occasion ("ma fille était là quand j'en avais
envie") précipite alors les évènements.
16 mars 2007
Jacques Delors, l’Européen
Ce livre de mémoires ne restera pas comme une oeuvre
littéraire. La construction sous forme de questions de Jean-louis Arnaud, le
journaliste, est étouffée par l’ampleur des réponses. Le résultat n’a ni la
familiarité du direct, ni la logique écrite de la rédaction. Le tout est un
compromis hasardeux.
L’homme politique Delors est hanté par cette
« conscience coupable » qui, selon Mauriac, habite tout chrétien,
spécialement les catholiques convaincus. Cette « aliénation » à un
péché originel l’empêche d’être apprécié des laïcs du Parti socialiste, donc a
bloqué sa candidature à la présidentielle de 2002. Delors, par ce dégoût de soi
perceptible, passe donc très vite sur son itinéraire personnel et vante en
termes convenus l’excellence des collaborateurs et des interlocuteurs à qui il
a eu affaire. Pour ceux qu’il n’aime pas, Elstine par exemple, il se contente
de dire qu’il les a rencontrés à tel moment, à tel endroit.
Mais le vrai Delors n’est pas dans ce personnage
conventionnel et emprunté. Il est dans sa nature humaine. Jacques Delors aime
les êtres humains, il a pour eux de la compréhension, de la compassion, de
l’empathie. Il aime s’y frotter, discuter avec eux, négocier, faire avancer les
choses, ensemble. Et là, pas de fausse modestie, Delors est très fort. C’est
l’un des mérites de François Mitterrand d’avoir su s’entourer de tels hommes
pour les utiliser. La force politique du président de gauche a été de savoir
les manipuler, certes, mais pour ce qu’ils savaient faire le mieux. C’est là le
meilleur de la politique, la vraie.
Dans une Europe à la diversité culturelle sans équivalent
sur un même périmètre, aux méfiances réciproques, aux intérêts divergents,
Jacques Delors a su forcer le respect des Allemands comme de Margaret Thatcher,
par sa probité et par son goût du compromis. Il a fait avancer l’Europe dans sa
construction, en évitant « l’arrogance française », en étudiant ses
dossiers avec sérieux, en échangeant beaucoup d’idées lors de réunions de
travail ou dans des ambiances détendues. Il savait « partager le
pain », comme il le dit avec componction. Il est l’homme des « petits
pas », adaptant le souhaitable au possible immédiat. Cette forme de
leadership est très efficace dans une telle diversité d’Etats en processus
d’union.
Jacques Delors croit en l’osmose entre le politique,
l’économique et le social ; entre le financier et le monétaire. Il croit
en l’équilibre institutionnel du Parlement, du Conseil et de la Commission,
mais à la condition que chacun remplisse pleinement son rôle. Les récriminations
sont dues, en général, à ce que l’une des institutions se défausse : le
Parlement en hésitant à légiférer, le Conseil en ne parvenant pas à dégager une
politique économique commune, la Commission en se mêlant de petits détails qui
fâchent.
Delors croit en l’éducation tout au long de la vie, pour
éviter les échecs, empêcher la marginalisation et brasser le monde des
décideurs à tous niveaux. Il croit que la porte n’est jamais fermée à qui a une
volonté. En bref, il croit en l’homme et en ses possibilités. Appliqués à la
construction européenne, ces principes issus du syndicalisme des origines, ont
fait merveille.
Pour ces réflexions de sagesse d’un homme pragmatique, ces Mémoires
se lisent avec bonheur. Dommage que la gauche française (du moins son électorat)
préfère encore l’infantilisme de l’attente d’un Grand soir sans cesse à venir.
Demain, on rase gratis - toujours demain. Aujourd’hui ? On attend.
Qui ? Le prochain Jacques Delors. En attendant Godot.
Jacques Delors, Mémoires, 2004, Pocket, 613 p
(Cf. Agoravox)
LE CHOIX DE DELORS
Jacques Delors s'exprime sur Ségolène Royal.
Quand François Bayrou évoque ces sociaux-démocrates dont il se sent si proche, il pense avant tout à Jacques Delors. Ah ! Delors ! S'il était plus jeune, c'est lui qu'il prendrait comme Premier ministre. Et Bayrou de laisser entendre ainsi que l'ancien président de la Commission est prêt à le rejoindre. Comme si leur alliance était naturelle ! D'ailleurs, si Delors se tait, s'il ne dit mot, c'est qu'il consent à ce rapprochement qui va de soi. Seulement voilà : Delors, comme son ami Rocard, que Bayrou a tenté de récupérer lui aussi, comme Pascal Lamy, le directeur général de l'OMC dont le nom a été lancé pour Matignon, est et reste socialiste, même si le PS ne s'est pas toujours bien comporté avec lui. «J'ai de la sympathie pour Bayrou», reconnaît volontiers Delors. Mais il ajoute aussitôt : «Avec Ségolène Royal, je partage des valeurs. J'ai découvert trois joyaux dans sa campagne. Elle a su dépasser les lignes. Elle a su se faire entendre des Français qui ont le sentiment d'être rejetés par la politique. Elle défend des valeurs - l'autorité, la famille - auxquelles je suis très attaché. Et ces valeurs, elle a réussi à les faire émerger grâce à ses débats participatifs.» C'est clair et net. Bayrou devra chercher une autre figure symbolique de la social-démocratie. (cf. Le Nouvel Obs)
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Cendra, un peu flemmarde ce soir...
ET SI LES FEMMES...
... (2ème partie) pouvaient être moins sentimentales.
Moins sensibles, moins tendres, moins douces, moins mères avec tout ce qui bouge. Envie de câliner, besoin d'amour, mais attention du Grand Amour... Moins "esthétiquement" belles, moins belles d'âme, moins intelligentes...
A quoi, cela tient-il tout cela ?
Notre façon d'être, de penser. très fortes et fragiles en même temps. Nous pouvons être douces, nous pouvons être dures. Nous pouvons être charitables, nous pouvons être impitoyables. Des bras de douceur et des vraies tigresses.
Cette complexité de notre être vient bien évidemment de la complexité de nos hormones. Nous évoluons avec nos cycles, nos humeurs.
Je crois que nous apportons un peu de douceur dans ce monde, et de la force pour le préserver. Nous sommes en quelque sorte les gardiennes de la paix et de la sérénité, de la pérennité de ce monde. Mais pas toujours. C'est pour cela que nous devons "tenir notre place" auprès de l'homme. Affirmer notre position. Ne pas baisser la tête, ne pas baisser les bras.
Mais le clivage n'est pas infranchissable. Pour ceux qui croient en la réincarnation, ils savent que cela est possible. Qu'il reste, plus ou moins, en nous une part de nos vies antérieures, où nous avons été homme, où vous avez été femme.
Ce clivage peut nous opposer, ou nous rapprocher.
Ce qui est indéniable, c'est que nous sommes faits pour vivre ensemble, côte à côte. Nous nous complétons.
Ce qui est dommage, c'est que cela n'est pas forcément le cas. Lutte de pouvoir. Manques de respect. je n'aime pas les religions pour cela car elles définissent les rôles d'une manière peu équitable et leur interprétation les rend encore plus inégales.
Mais le sentiment est la richesse de la femme. C'est ce qui amène à regarder l'autre. C'est ce qui peut aussi amener à détester. L'amour, la haine, la joie, la tristesse.
Gardons l'oeil ouvert !
Je pense également que nos différences ne sont pas toujours évidentes. Il peut y avoir des hommes plus doux que les femmes et des femmes tellement brutales que rien que d'en parler, j'en tombe par terre !
En fait, il n'y a plus tant de différences que cela. peut-être plus dans la sexualité. Par forcément dans la manière d'être.
Fragile parfois, je laisse mon coeur dériver. Alors, je me force à avancer, à tenir tête, à garder le cap. A affirmer mes convictions. Parfois à les chercher ! Je laisse les mots alors me guider, mes pas me mener, le hasard faire les choses, le regard appréhender l'espace, le temps me courir après !
Parfois, je laisse mes rêves flotter dans un air de musique aux balancements de mon coeur et mon regard qui s'échappe, personne ne sait où il va... Personne.
HISTOIRE D'HAUTRE
C'est l'histoire de la planète HAUTRE.
Un monde merveilleux où régnaient la paix et l'harmonie. Apparemment.
Le peuple, les Hautriens n'étaient pas forcément des plus heureux mais ne faisaient pas partie des peuples les plus mal lotis de la galaxie SIPHARDS2. Le soleil chauffait agréablement leur douce planète, l'air était à peu près respirable car ils avaient trouvé de nouveaux moyens de transports moins polluants. L'industrie, depuis longtemps, n'était plus implantée sur leur planète, mais sur des planètes connexes. L'eau coulait non pas abondamment, mais suffisamment pour abreuver la population.
Ils avaient tout pour être heureux.
Mais...
Il y avait seulement des petits Frixions (petits êtres bizarres qui s'entrechoquaient continuellement), et cela ne pouvait être résolu par de la science. C'était, en fait, de l'art véritable. Seul un être venant d'une autre planète pourrait calmer la brèche, la fougue, l'emportement de ces Frixions.
Comme dans toute galaxie, tout univers, comme sur toute planète, comme le jour et la nuit, la dualité créait les Frixions.
Ces petits Frixions, comme tous les êtres, avaient un nom. Ils étaient deux bandes de Frixions en fait : les Dalmatto et les Nallerd...
D'où venait l'appartenance à l'un ou l'autre des clans ? Cela dépendait du hasard des rencontres, de là où les Hautriens étaient nés, où ils habitaient... Ils étaient différents, mais pas tous. Parfois, c'était flagrant, non pas forcément par le physique mais flagrant surtout, de par la nature de leurs pensées... Parfois, c'était difficile de les distinguer !
Beaucoup d'Hautriens étaient gênés par l'existence de ces frixions. D'autres trouvaient cela amusant... Et d'autres enfin étaient dedans.
Mais... vous saurez la suite de l'aventure extraordinaire de ces petits êtres... prochainement...
15 mars 2007
AIDER AIVI
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Comment ?
Vous pouvez nous aider : ici
Merci de votre lecture.
CENDRA
LA CONDITION FEMININE selon M. BAYROU
Permettez de mettre ici la proposition de M. Bayrou :
Condition féminine
« Priorité aux femmes »
Les femmes assument souvent deux vies en même temps : familiale et professionnelle. D’autres se retrouvent complètement seules à "tout porter". Il y a enfin celles qui sont victimes, qui se taisent : François Bayrou s’engage à les aider.
« Je veux parler de la vie des femmes, et notamment de cette contrainte que représente le fait
d'avoir, très souvent, deux vies en même temps. Même si cela va mieux, même si les tâches
familiales et professionnelles sont mieux équilibrées,
les femmes portent toujours une très grande part de la responsabilité de la
famille.
Je veux en parler avec elles : du travail précaire, des CDD, des temps de travail à 20
heures, des emplois du temps que cela représente, avec leur vie personnelle et leurs charges de
famille…
C'est un très grand enjeu que l'équilibre à trouver autour de la condition de la femme.
Salaires inférieurs d'un tiers à ceux des hommes, exigences plus grandes de la part des employeurs,
fragilité qu'elles ressentent parce qu'elles se retrouvent souvent seules. Tout ceci est lourd à
porter.
Les femmes sont trop souvent victimes de violences, dans les cités en particulier : il faut
qu’elles prennent les choses en main et fassent entendre leurs voix. Quand nous avons appris
l'épouvantable drame de cette jeune fille transformée en torche vivante dans un bus incendié par
des criminels dans la banlieue de Marseille, je me suis dit qu’un jour viendrait où il y
aurait une révolution des femmes dans les quartiers. Et j’aiderai de toutes mes forces cette
révolution des femmes pour sortir les banlieues du drame.
Etre femme aujourd’hui, c’est aussi, parfois, être confrontée à la violence
conjugale.
La violence conjugale, c’est l’enfer. Pour les femmes, parce que leur
foyer devrait être un lieu de paix et de protection, et qu’il devient le lieu de
l’humiliation et des coups ; pour les enfants, dont la vie est brisée par ce qu’ils
voient et ce qu’ils entendent. Il faut en parler davantage pour que les femmes échappent à la
honte injuste qu’elles ressentent. Pour qu’elles parlent.
Pour lutter contre la violence conjugale, je propose une loi-cadre, qui développerait
l’information, y compris par la télévision. Je veux aussi accroître le nombre et la qualité
des structures d’accueil des femmes et des enfants. Renforcer la veille sociale. Donner à la
justice les moyens de sanctionner le coupable et de l’éloigner du domicile. »
Permettez-moi de dire que c'est bien léger, cela n'est pas suffisant bien que l'intention de départ soit honnête mais digne d'un homme conservationniste...
je rajouterai même que l'enfance et la protection de l'enfance ne font même pas partie de ses propositions.
Je suis foncièrement choquée !