12 juin 2007
CARTE SCOLAIRE : LE POINT DE VUE DES CHEFS D'ETABLISSEMENT
La carte scolaire vue par
des chefs d’établissement
Après avoir été reçus par le ministre de l’Education le 23 mai dernier, les chefs d’établissement, par le biais du SNPDEN leur syndicat majoritaire, viennent de lui adresser des propositions. Leur credo: renoncer à la carte scolaire oblige à définir d’autres modes de régulation... Explications avec Jean-Claude Lafay, secrétaire national au SNPDEN, à la veille de leur réunion avec Nicolas Sarkozy, prévue le 11 juin.
Pourquoi
faut-il de la mixité sociale à l’école ?
Il y a une raison politique et une raison pédagogique : parce qu’elle est
le creuset de la société, l’école doit mélanger les différentes catégories de
populations. Ca c’est la raison politique. Maintenant, en terme de pédagogie,
on sait depuis longtemps qu’une classe avec de la mixité sociale progresse
mieux qu’une classe où la mixité est absente.
Comment
s’est passée votre rencontre avec le ministre de l’Education ?
Il pensait que nous étions opposés à toute discussion : il a été surpris
de voir que ce n’était pas le cas et il nous a demandé de lui faire des
propositions : ce que nous avons fait le 24 mai, lendemain de notre
rencontre.
Quelles
sont vos propositions ?
Tant que la carte scolaire reste en partie utilisée, c’est-à-dire au moins
jusqu’en 2010, d’après le ministre, il faut d’abord plus de transparence dans
l’information : aujourd’hui ce sont les familles des milieux favorisés qui
savent le mieux quels sont les meilleurs établissements et qui maitrisent les
« combines » pour obtenir une place. Plus de transparence, cela
signifie que les zones de desserte soient définies sous forme de carte lisible
et claire, et que les critères d’admission soient connus.
Vous
êtes proviseur à Paris. Quelle est la situation dans cette ville ?
A Paris, la carte est déjà assouplie : le premier choix pour le lycée est
libre. A ma connaissance, les inégalités entre lycées augmentent. Chaque
établissement est libre de ses critères d’admission et certains seulement
prennent en compte l’objectif de mixité sociale. En l’absence de régulation,
les établissements ont tendance à choisir d’abord en fonction du niveau des
candidats.
Vous
appelez à plus de transparence. Quelles sont vos autres propositions ?
Nous pensons que le critère de proximité doit rester un critère important : il est très dommageable pour un élève de se voir refusé dans le collège, voire le lycée de son quartier. Nous proposons aussi que les moyens attribués aux établissements soient calculés pour permettre cet accueil de proximité et pour favoriser la mixité sociale. Il faut aussi que le choix des options [langues rares, etc] se fasse après l’affectation dans un établissement. Aujourd’hui, le choix de l’établissement et des options se fait en même temps et bien souvent les familles les plus favorisées choisissent une option pour être prises dans un établissement réputé.
Que
pensez-vous des expériences menées à Science Po et à l’Essec ?
Tout ce qui permet à un élève d’un milieu défavorisé de faire une scolarité de
qualité est bienvenu. Mais sur le principe, nous préférons largement
l’expérience menée par l’Essec [« une prépa, une grande école, pourquoi
pas moi ? » est une forme de tutorat et d’accompagnement culturel
entre des étudiants de grandes écoles et des lycéens volontaires de zones
défavorisées] à la formule choisie par Science Po, fondée sur la dérogation [un
concours parallèle est organisé pour les candidats issus des ZEP]
Et la
proposition de Patrick Weill, consistant à accueillir dans les classes
préparatoires les 7 ou 8 % des meilleurs de tous les lycées confondus ?
Elle serait efficace pour la mixité sociale et c’est pourquoi elle mérite
d’être étudiée.
Tout le
monde est pour la mixité sociale mais dans la pratique les parents qui ont le
choix préfèrent des établissements « bien cotés » où la mixité est
faible. Comment résoudre le conflit entre libre choix et mixité sociale ?
Il y a un effort d’éducation à faire de la part du pouvoir politique. Dans un
système totalement libre, les parents vont tous vouloir les établissements les
mieux cotés. De toute évidence les parents les mieux
informés, qui sont de milieux plutôt favorisés, tireront les bénéfices de la
concurrence entre les établissements, mais aussi entre les familles.
Il n’est pas évident que beaucoup de familles en tirent un vrai bénéfice, alors
que la collectivité, elle, a la certitude d’y perdre. L’intérêt collectif doit
primer, et il n’est pas nécessairement opposé à l’intérêt de chacun :
c’est cette information et cette éducation que les pouvoirs publics ont le
devoir de mettre en avant.
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